Homélie de Mgr Piat à l'occasion de l'ouverture de l'année de la foi

 Homélie à la messe d’ouverture de l’Année de la foi

Marie-Reine-de-la-Paix

Dimanche 14 octobre 2012

En entrant aujourd’hui dans l’Année de la foi, rappelons-nous que la foi naît de l’écoute.  L’écoute  de la Parole de Dieu d’abord; l’écoute aussi de l’Esprit qui travaille dans notre Eglise et réveille la foi dans le cœur de beaucoup d’hommes et de femmes aujourd’hui; l’écoute enfin du monde où nous vivons, l’écoute des gens, de leurs joies de leurs peines, de leur soif spirituelle,  ce que les jeunes cherchent, ce que les enfants attendent. C’est pourquoi nous confions l’Année de la foi à la Vierge Marie, elle qui a été un modèle d’écoute active, une écoute qui disait « qu’il me soit fait selon ta parole ».  C’est pourquoi nous allons aussi commencer par écouter Dieu qui nous adresse la parole à travers le récit de la rencontre de Jésus avec le jeune homme riche.

1. N’aie pas peur, laisse toi regarder par le Christ

Une phrase me touche beaucoup dans ce récit : « fixant alors sur lui son regard, Jésus se mit à l’aimer ».

Aujourd’hui aussi,  en ce premier jour de l’Année de la foi, Jésus fixe son regard sur chacun d’entre nous. Il nous contemple avec amour, comme un papa ou une maman pose son regard sur son enfant et l’aime intensément.

Ce regard de Jésus est comme une parole silencieuse qui exprime un amour à la fois intense et humble. C’est comme si à la fois il nous suppliait de lui faire confiance et qu’il respectait notre liberté, et qu’il nous laissait du temps pour lui donner notre réponse.

a)      Ce regard de Jésus se pose sur de bonnes personnes comme le jeune homme riche, des personnes qui ne sont ni des voleurs, ni assassins, ni adultères. Des personnes qui, comme nous, cherchent leur salut et se demandent ce qu’elles doivent faire pour avoir en héritage la vie éternelle. Des personnes qui croient qu’il y a beaucoup de choses à faire pour mériter ce salut.

A ces personnes, Jésus dit, comme il disait au jeune homme riche, « une seule chose te manque ».  Cette chose qui manque n’est pas une chose de plus à faire pour pouvoir avoir en héritage la vie éternelle. Ce qui manque,  c’est de s’arrêter, de faire silence et de laisser reposer sur nous le regard du Christ.  Ce qui manque ce n’est pas de faire plus, mais de se laisser faire, comme la Vierge Marie qui disait, « qu’il me soit fait selon ta parole ».

Si nous nous laissons aimer par Jésus, alors nous découvrons que c’est Lui qui nous aime le premier, gratuitement, avant même que nous n’ayons fait quoi que ce soit pour lui;  nous découvrons son amour comme un trésor, comme ce qui donne sens à notre vie; et alors « il nous suffit d’être aimé ».

En cette Année de la foi, faisons confiance à Jésus, croyons que seul son amour gratuit nous sauve, parce que seul cet amour peut nous transformer et nous donner la force d’aimer à notre tour.

b)      Ce regard de Jésus s’est posé aussi sur Pierre.  Après le dernier repas, il  avait renié Jésus, il avait eu honte de lui et avait pris un autre chemin. Mais plus tard, Jésus croise Pierre sur son chemin et pose sur lui son regard. Pierre fond en larmes parce que dans ce regard il a trouvé le pardon, l’amour gratuit de Celui qui au bord du lac l’avait appelé et lui avait fait confiance. C’est comme si Jésus lui disait : « ce que tu as fait n’est pas bon, cela m’a fait mal, mais au fond tu es une bonne personne, je te refais confiance, ma porte est ouverte pour toi, je t’attends, tu peux revenir si tu veux ».

Le regard que  Jésus pose sur nous aujourd’hui est un regard plein de douceur et de pardon, comme celui que Jésus posait sur Pierre; c’est un regard qui nous invite à la conversion, un regard qui nous transforme comme il a transformé Pierre.

En cette Année de la foi, n’ayons pas peur, laissons-nous regarder par le Christ.

Chant : « N’aie pas peur, laisse toi regarder par le Christ… »

1. N’aie pas peur, donne priorité à Jésus dans ta vie

Après avoir fixé son regard sur lui, Jésus dit au jeune homme riche, « va, vends tout ce que tu as, donne-le aux pauvres, tu auras un trésor dans le ciel, puis viens et suis moi ».

En nous donnant son amour gratuitement, Jésus ne cherche pas simplement une réponse sentimentale. Il nous invite plutôt à prendre une décision. Car l’amour vrai n’est pas seulement quelque chose qu’on ressent, c’est avant tout une décision que l’on prend, la décision de se donner, d’être fidèle.

a)      « Va, vends tout ce que tu as » ne veut pas dire littéralement va mettre en vente ta maison, ta moto ou ton auto, ton computer, ta TV etc. et va dormir dans la rue. « Va vends tout ce que tu as » prend son sens quand nous commençons à découvrir l’amitié avec le Christ comme un trésor, comme la « perle rare », la chose la plus précieuse que nous puissions trouver sur la terre. Si, pour nous, il n’y a vraiment rien de plus précieux que son amour, alors nous serons prêts à tout perdre, à tout vendre, plutôt que de perdre son amour.

b)      « Va vends tout ce que tu as, …puis viens et suis moi » est ainsi une invitation à donner priorité à Jésus dans sa vie, à laisser Jésus passer devant, nous guider. C’est une invitation à se mettre à son école, à laisser ses valeurs devenir nos valeurs, à apprendre à aimer ses ennemis et à pardonner comme il nous a pardonnés, à servir nos frères comme il s’est mis à notre service, à être patient comme il a été patient avec nous.

c)      Le chemin de Jésus, où il nous invite à le suivre, est en fait le chemin du Bon Samaritain. C’est le chemin de celui qui se laisse toucher par son frère blessé sur le bord de la route, le chemin de celui qui se laisse déranger, qui s’arrête, qui ne se contente pas de donner de l’argent mais prend le temps qu’il faut pour accompagner son frère jusqu’à qu’il soit guéri.

d)        Il se trouve que l’Année de la foi coïncide avec une année qui risque d’être très difficile sur le plan économique. C’est comme un cyclone qui approche et déjà on commence à entendre les avertissements. Beaucoup de personnes risquent de souffrir, et surtout les plus pauvres, qui sont toujours les plus vulnérables. Quand un cyclone météorologique approche, nous savons nous préparer et prendre des précautions; nous savons aussi nous montrer solidaires avec ceux qui sont les plus exposés au cyclone. Maintenant qu’un cyclone économique est annoncé, saurons-nous entendre les avertissements du Christ qui nous invite à nous préparer spirituellement à apporter notre soutien  à ceux et celles qui vont souffrir de ce cyclone qui arrive ?

Il faut que l’Année de la foi devienne en même temps une année de la solidarité.  Jésus pose sur nous son regard pour que nous regardions avec lui dans la même direction. Suivons son regard, et nous serons conduits à nous arrêter auprès de nos frères blessés au bord du chemin.

Chant : Dan to regar lamour dir so secre

            Facil kone

            Li revele nou to faiblesse pou tou limanite

1. Devant l’invitation de Jésus, le jeune homme riche devient sombre et s’en va tout triste parce qu’il avait de grands biens. Et Jésus insiste « Comme il est difficile à ceux qui possèdent des richesses d’entrer dans le Royaume de Dieu ». C’est vrai que l’invitation de Jésus nous met devant une décision difficile à prendre.

a)       Mais pourquoi c’est difficile à un riche d’entrer dans le Royaume de Dieu ?

Le riche ici n’est pas simplement celui qui a beaucoup d’argent. Le riche c’est celui qui croit que plus il accumule des biens de consommation,  plus il sera en sécurité et plus il sera heureux. Le riche est celui qui ne veut pas se contenter de ce qui est suffisant. Le riche est celui qui, même s’il n’a pas beaucoup de biens, ne veut pas quitter son petit confort pour donner de son temps. La plus grande richesse que nous avons est notre vie, notre temps. Et c’est la chose que nous trouvons le plus difficile à donner. Le riche, c’est chacun de nous lorsque nous avons peur de quitter  nos bagages derrière nous et passer par la porte de la foi pour rejoindre le Christ sur son chemin. La porte est étroite, elle est serrée, et on ne peut pas passer si nous avons  des bagages lourds et encombrants dans les bras. Il faut laisser tomber beaucoup de choses pour passer par la porte. On ne peut pas rejoindre Jésus si on est trop chargé. Il faut faire confiance à Jésus;  seule son amitié peut nous combler, peut nous rendre heureux.

La porte s’appelle « la porte de la foi » parce qu’il faut être léger et faire un saut dans la confiance pour passer.

b)       Même les disciples sont surpris devant cette manière de parler de Jésus. Et ils disent, « mais alors qui peut être sauvé ? ». Et Jésus de répondre : « Pour l’homme c’est impossible, mais tout est possible à Dieu ». 

Ce que Jésus veut nous dire, c’est que par nous-mêmes nous ne pourrons jamais nous hisser à ce niveau de détachement ; par nous-mêmes nous n’aurons jamais le courage d’abandonner nos bagages pour pouvoir passer par la porte de la foi.

C’est pourquoi, Lui pour qui tout est possible, il nous tend la main. Il nous invite à nous laisser faire, à nous suffire d’être aimés et à laisser  son amour déployer sa puissance dans notre faiblesse.

Suivre le Christ n’est pas accomplir une performance d’athlète, c’est plutôt s’abandonner comme un enfant et se laisser conduire.

En cette Année de la foi, prendre la main que Jésus nous tend, c’est concrètement, prendre notre bible et écouter sa parole, c’est prier en famille, c’est prendre rendez-vous avec son pardon dans le sacrement de réconciliation, c’est participer à l’Eucharistie et nous nourrir de son  amour, c’est aussi accueillir les frères et les sœurs qui nous invitent à venir écouter la Parole avec eux, ou à venir visiter les malades avec eux, ou encore à venir participer à une session de formation.

Durant cette Année de la foi, soyons attentifs à ces différentes façons dont Jésus nous tend la main.  N’hésitons pas à prendre cette main qu’il nous tend.

Chant : Kondir moi, vey lor moi

            Senier, prend mo la main

            Kondir moi, vey lor moi

            Montre moi to sime