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ZEZI VRE ZOM
16 mai 2012

Interview de Mgr Piat au sujet de l'avortement

piat1mar

Mgr Maurice E. Piat : « Je ne suis pas chargé de vous convaincre, je suis chargé de vous le dire »

 

  1. Le Conseil des Religions (CR)  a pris un peu à contre-pied la position de l’Eglise Catholique et de l’Eglise Anglicane. Cela vous a-t-il surpris ?

Tout ce que nous avons du Conseil des Religions est une déclaration de M. Majeed Korumtally aux radios. Il n’y a pas eu de communiqué officiel. D’après nos renseignements, il n’y a pas eu de réunion formelle du CR pour discuter de cette question. Il ressort également que M. Korumtally ne parlait pas au nom du CR mais en son nom personnel.

 

  1. Est-ce que le Père Philippe Goupille a une opinion différente de la question que la vôtre ou bien est-ce qu’il a du être plus tolérant à l’opinion des autres a cause de son engagement au CR ?

Toutes les radios qui ont donné la parole à M. Korumtally ont précisé que le père Philippe Goupille n’était pas à Maurice au moment où M. Korumtally faisait sa déclaration. Par ailleurs, pour avoir travaillé étroitement avec le père Goupille, je sais très bien qu’il partage entièrement la position de l’Eglise catholique.

 

  1. Vous demandez, dans votre lettre aux députés, que Maurice ne subisse pas le diktat des Nations Unies, mais elle devrait selon vous, subir le diktat de l’Eglise Catholique ?

L’Eglise Catholique, au cours de sa longue histoire, a développé une vision de la personne humaine. Aujourd’hui l’ensemble du monde scientifique est d’avis que la vie humaine commence dès la conception. Cette vie humaine, avec son patrimoine génétique unique, a droit à la protection de l’ensemble de la famille humaine. L’Eglise ne veut pas imposer une doctrine religieuse. Elle ne fait qu’exprimer ce que, à son sens, la sagesse humaine demande par rapport à l’avortement.

 

  1. Cette position étant connue, cela vous a-t-il surpris que le conseil des ministres approuve le principe de légalisation partielle de l’avortement ?

Depuis longtemps, différentes autorités ont fait savoir que le parquet travaillait sur un projet de loi. Mais il est vrai qu’on peut se poser des questions quant au timing.

 

  1.  Jusqu’ici les gouvernements successifs n’avaient pas osé aller de l’avant avec ce projet. Cela, en grande partie à cause de la position de l’Eglise. Comment interprétez-vous le fait qu’ils ont maintenant passé outre à votre objection ?

D’abord, le Conseil des ministres n’a fait que proposer un projet de loi ; celui-ci n’a pas encore été voté. Et que je sache, le gouvernement n’a pas encore passé outre à notre objection.

 

  1. Mais, dans le fond, cet amendement ne changera pas grand-chose, car il ne forcera personne à se faire avorter. Il ne fera que s’assurer que celles qui allaient déjà le faire dans des conditions inhumaines, le fassent en sécurité.

S’il y a des jeunes filles ou des femmes mariées qui envisagent l’avortement, notre devoir n’est pas de donner des conditions cliniques pour le faire en toute sécurité. Notre responsabilité humaine c’est de leur parler comme à des sœurs qui sont en détresse et les aider à assumer avec dignité la maternité qui se présente à elles. L’expérience montre que très souvent les femmes recherchent l’avortement à cause de la pression qu’exercent sur elles leur conjoint, leurs amies, l’opinion publique.

 

  1. Ne pensez-vous pas qu’en faisant ainsi la leçon aux femmes, qui ne prennent pas cette décision de gaieté de cœur, vous êtes en train de les insulter ?

En m’adressant aux femmes qui se posent la question de l’avortement, je sais bien qu’elles sont en détresse et que ce n’est pas quelque chose qu’elles envisagent de gaieté de cœur. C’est pourquoi je ne cherche pas à leur faire la leçon. J’invite plutôt les membres de l’Eglise à être disponibles pour écouter ces femmes sans les juger, les soutenir et les accompagner. Je voudrai aussi que les femmes puissent entendre que l’avortement peut avoir de lourdes conséquences physiques et psychologiques. Le traumatisme post avortement est une réalité.

 

  1. Mais chacun doit être libre de son choix. Et les femmes qui ont décidé de se faire avorter, le feront, que ce soit légal ou pas.

C’est vrai.  Cependant, la loi a un rôle pédagogique. Ce n’est parce que les barons continuent à vendre de la drogue qu’il faut dépénaliser le trafic. Ce n’est pas parce que des pédophiles continuent à abuser sexuellement des enfants qu’il faut légaliser la pédophilie.

 

  1. D’où votre argument de banalisation de l’avortement ? Pensez-vous vraiment qu’il existe des femmes qui se font avorter par plaisir ?

Aujourd’hui il y a des lieux où l’avortement est pratiqué en toute impunité. Il n’est pas rare d’entendre des femmes dire qu’elles ont eu recours à trois, quatre, cinq avortements, ou même davantage.  Les femmes qui ont recours à l’avortement, sont loin de le faire par plaisir. C’est vrai. Quand je parle de banalisation de l’avortement, je me réfère à cette façon de ne pas prendre suffisamment au sérieux l’instinct maternel de la femme enceinte, la dignité de celle qui souhaite donner naissance à la vie qu’elle porte en elle. La maternité est une des plus belles réalités humaines, elle mérite d’être valorisée.

 

  1. Comment peut-on parler de dignité de la femme quand une institution religieuse essaie de décider ce que la femme peut ou ne peut pas faire ?

L’institution religieuse que je représente ne cherche nullement à décider pour la femme ce qu’elle doit faire ou pas. Quand je m’adresse aux femmes, je ne m’adresse pas à elles comme une autorité insensible qui veut s’imposer.  Je reconnais d’abord qu’elles vivent des situations extrêmement difficiles et  je cherche à les accompagner et à éclairer leur conscience en leur donnant les éléments nécessaires pour arriver à une sage décision.

 

  1. Vous parlez d’amour et de responsabilité comme des alternatives à l’avortement. Mais de quel amour et de quelle responsabilité parle-t-on quand un père viole sa fille de 11 ans et la met enceinte ?

Bien sûr que la jeune fille victime de l’inceste vit un traumatisme terrible. C’est pourquoi cette jeune fille a tellement besoin  qu’on prenne le temps de l’écouter, de comprendre ce qu’elle vit avant de décider pour elle que l’avortement est la solution à son problème. On peut aussi comprendre la honte de la famille qui veut, par l’avortement,  effacer vite tout signe de ce qui s’est passé. Malgré cela est-ce bien sûr que ce dont la jeune fille enceinte a le plus besoin est qu’on la conduise à vivre un deuxième traumatisme, celui de l’avortement ?

 

  1. Forcer une fille de 11 ans à garder ce fruit de l’inceste n’est pas irresponsable ? Comment peut-on penser que cela ne gâchera pas sa vie et celle de l’enfant ?

C’est vrai que l’enfant qui naîtra d’un inceste sera profondément affecté par tout cela et qu’il en souffrira. Mais qui sommes-nous pour décider que cet enfant ne mérite pas de vivre ? Qui sommes-nous pour prédire qu’il ne pourra jamais surmonter sa souffrance ? Et à partir de son expérience douloureuse, apporter quelque chose à la société ?

 

  1. Tous les Mauriciens ne sont pas catholiques et ne penseront pas que « Dieu » a voulu que ce soit ainsi. Vous parlez d’âme et de conscience, mais vous voulez imposer votre croyance aux autres ?

Je n’ai jamais mentionné Dieu dans mes prises de position parce que, même si la Bible en parle, ce n’est pas une croyance qui nous est imposée arbitrairement. Le refus de l’avortement est une position qui se défend rationnellement et je ne cherche donc pas à imposer mes croyances religieuses à mes compatriotes. En mon âme et conscience, je dois partager avec eux les arguments qui, selon la raison humaine, peuvent éclairer leur conscience et les conduire à des décisions plus humaines.

 

  1. Le projet de loi ira probablement de l’avant. Serait-ce un échec pour l’Eglise ? 

Si le projet de loi était voté au Parlement, je serai triste, très triste pour mon pays. Mais comme la petite Bernadette Soubirous le disait aux autorités ecclésiastiques, « je ne suis pas chargée de vous convaincre, je suis chargée de vous le dire ».

De Deepa Bookun,  paru dans l'Express

 

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Commentaires
J
Merci Judex pour tes commentaires justes et éclairants. Peu de personnes malheueusement pensent comme toi aujourd'hui et ceux qui peuvent le faire n'osent pas faire sentir leurx voix !
D
en suivant les actualites et tout ce qui se passe dans le Monde et dans notre pays,je realise que petit a petit on a perdu le vrai sens de la VIE.Notre societe a besoin de retrouver des reperes.Depuis Janvier pratiquement chaque semaine on entend des homicides atroces.A tel point qu'on peut constater que les Mauriciens ne s'en emeuvent plus ou peu quand ils entendent qu'il y a eu un crime.Et voila que L'Etat en meme suggere qu'on peut tuer un etre vivant pour Quatre raisons.Quel message envoyons nous a notre societe Mauricienne.Est-ce si urgent de faire passer cette loi?Pourquoi maintenant ? Il ' n'y pas des pro-life ou pro-choice?La vraie question c'est comment allons nous changer notre conception des valeurs ? Le message envoye aux Jeunes est actuellement "L'EGOISME " ,La "Competition",La REUSSITE PERSONNELLE A TOUT PRIX.Valorisons la SOLIDARITE,L'ENTRAIDE ,LA REUSSITE EN GROUPE.Mobilisons nous pour rendre notre societe plus caring.Et nous n'entendrons plus cette reponse"Que chacun vote selon sa conscience.CONSCIENT DE QUOI?
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